Elle court, elle court, la rumeur…

« Tu as vu ? Non ? Ben si, tout le monde en parle. Machin s’est fait prendre à un contrôle inopiné… »  Merde… Mais les faits sont là, têtus. Il n’y a pas à discuter. Pourtant, ça discute et ferme en plus.  Le Net bruisse de basses en aigües. En notes fausses surtout… « Quoi ? T’étais pas au jus ? Truc m’a dit que Machin connait la sœur de Bidule qui bosse dans une pharmacie. Et puis, il a été vu avec Chose à Pétarouchnoque. Non mais, tu te rends compte ? »
Je me rends conte, tu veux dire !  On est là dans la fiction, la science fiction. On est dans la rumeur, les « on dit que » devenus « je sais que » voire même « j’ai vu que ». C’est tellement facile. Un peu lâche aussi. Forcément, « on » dit mais « je » dis pas. 

Aussi lâche et exaspérant que ces affirmations à l’emporte pièce : « Pour faire un Ultra, il faut se doper, c’est sûr ». Ben non, désolé. Aussi désolant que tous ces gens qui parlent pour nous, qui disent tout haut ce que tous pensent tout bas. Ben non, désolé encore. Je suis assez grand pour dire tout haut ce que je pense tout bas. Si je le juge utile.

Pour tout dire, j’en ai parfois soupé de tous ces gens qui parlent pour moi, pour vous, pour nous. C’est tellement facile de se faire porteur de l’opinion générale ou qualifiée comme telle. Tellement facile mais tellement lâche. Le niveau zéro de l’argument, le caniveau de la discussion… En tous cas, la négation de la pensée des gens, de leur capacité à réfléchir.  On est là dans une totale remise en question de la liberté individuelle à penser, à réfléchir, à se faire une opinion, à l’exposer. On surfe sur l’émotion, le jugement hâtif, le raccourci.

La dignité et la liberté me soufflent de refuser ce dictat de le pensée unique et simpliste, cet étalage de la rumeur. Je me redresse. Je m’élance. Je pars courir, libre.